mardi 6 avril 2021

 

Tu sais l' étouffement du cri resté en gorge

La douleur inaudible

L'onde à jamais perdue

La tension à craquer des côtes

La crampe aux tripes

La gorge frottée au sable, au sel et à l'acide

La démangeaison sans le répit de l'ongle

Le vertige sans cesse continué

Le sol toujours dérobé

La mer sèche

Le froid au fond des os

La paume du pied à chaque pas brûlée

Le manque infini que contient chaque instant

La fuite de tout ce qui serait accompli si tu n'étais pas toi




samedi 13 février 2021

 

Recroquevillé dans les possibles

se débarrasser du présent

imaginer dans chaque instant un piège, ou un refuge

déserter sans cesse

sauter de vent en vent

de sable en sable

(crisser caresses)

creuser l'abri

s'enfouir la tête

et s'envoler

lundi 13 avril 2020

Le seul cynisme valable est celui qui se tenant sur le même territoire que l'espoir,  s'apparente à une forme pervertie d'innocence.

mercredi 12 février 2020



En courant elle sent la main de sa mère qui conduit doucement son épaule, son regard qui lui suggère la bonne posture, la bonne vitesse, le geste juste, ces images, ces sons, ces odeurs même, ces perceptions que sa mère savait lui faire sentir et méditer, dans lesquelles elle lui apprenait à se couler et à agir, la morsure délicate d'une racine au pied bien incliné, la caresse d'une branche frôlée, l'ivresse calme de la chute prévue, tout est là qui accompagne sa course, cette danse qu'elle a si souvent répétée sans jamais vraiment réaliser qu'elle était celle d'une fuite définitive.

Elle court encore longtemps une fois la rivière traversée, mais de moins en moins vite, de plus en plus prudemment. La peur pourtant s'efface à mesure que l'ombre des arbres s'épaissit, et que s'éloigne la vraie menace.
La forêt est de plus en plus noire, profonde et rassurante, les hommes en armes sont de plus en plus loin, tournant avec leurs chiens après une proie maintenant inatteignable. La forêt leur est menace, ils ne s'y aventureront qu'avec de quoi couper, tuer, arracher, exorciser tout ce qui les cerne.

Elle s'arrête enfin au pied du grand arbre, reste un moment encore en alerte, puis, recroquevillée autour du sommeil qui doucement envahit son souffle et les battements de son cœur, elle s'endort où la peur les attend.


Ce qui arrive était prévu, elle était préparée.
Ils ne l'attraperont pas, il n'en sont pas capables.
Sa mère savait que cela pouvait arriver, qu'ils pouvaient très vite se retourner contre ce avec quoi ils vivaient tranquillement jusqu'à présent, au moindre vent mauvais. Croire qu'en éliminant ce qu'ils imaginaient être la cause de leurs souffrances, ils éliminerait cette souffrance. Que s'il y avait douleur, il y avait faute, et fautif. Et que leur position ambiguë, marginale, à la fois dehors et dedans, faisait d'elles des coupables faciles à fabriquer et à détruire.











samedi 25 novembre 2017

To do list

Réagencer les rouages. Produire d'autres désirs, plus fidèles à la matière entrante. Huiler ce qui doit silencieusement glisser et sabler ce qui doit crisser. Se laisser décider : déléguer aux intentions silencieuses le choix des directions. Faire confiance à ce qui est là. Prendre ce qui est donné. Laisser passer le vent. Accompagner les forces. Accepter aussi d'avoir perdu ce qu'on a négligé. Non pas se changer, mais faire de soi une autre même chose. Non plus se convertir, mais renouveler les mêmes illusions, les mêmes adhérences et les mêmes refus . Purifier ce qui devient en soi de ce qui voudrait être. Cesser de vouloir arrêter, de vouloir en avoir fini. Ce qui est perdu n'est rien ou n'est plus en tous cas ce que tu crois que c'était. Réconcilie ce qui te déchire. Fais de la guerre un jeu et une danse.

Il faut rire de soi sans sarcasme, comme on rit de l'innocence et de la naïveté qu'on projette naïvement sur l'enfance, retrouver avec soi cette complicité possible. Ne plus dire "arrête un peu" mais "continue, mais mieux, mais plus."
Écouter la réponse de l'enfant :

"Je t'entends et je vais où je vais qui se tiendra toujours loin de ce que tu peux imaginer. Ce sera grâce à toi que malgré toi je deviendrai cet autre que tu rencontre déjà en moi sans encore le reconnaître"

lundi 13 novembre 2017

On regarde très vite les images sur internet, comme on lit très vite ce qui y est écrit.
On se contente d'échantillons. On rate des profondeurs.
L'image et le mots sur l'écran font signe vers leur propre mode d'apparition, image de l'image d'une image et mots pour mots.
Vitesse du regard, ennui à la marge intime - et trouille subséquente. L'ennui nous traque et nous entraîne à traquer tout ce qui bouge trop vite pour être capturé.

Nous ne nous lasserons pas de l'instant d'après, et l'imminence qui précède l’écœurement sera répétée jusqu'à l'écœurement.

habeas corpus


Je possède mon corps. Il est ma propriété. Mon corps est donc sous le même régime que tout ce dont je suis propriétaire. Comme je possède ce corps que suis, je deviens possédé par moi, au même titre que toutes mes autres possessions.
Les entreprises peuvent enfin devenir des personnes morales.